Première histoire.

Dans 2 jours et 2 heures, je porterai  ma veste Saint Laurent Rive Gauche.
Une très belle affaire ! Summer 2017. Je me balade, un jour de canicule du mois de juillet dans les rues de Manhattan, en route pour le NY NOW – salon de la Mode au Javits Center. Mon téléphone à la main, en live sur Instagram.
2 fois par an, je fréquente les salons de la mode à New York. Pour le travail. Pour l’amour de la mode aussi.
Revenons à cette superbe veste et à notre rencontre…
J’arrive enfin dans le grand centre des congrès. Superbe dome vitré à l’architecture epurée, il offre profusion d’espace. Les accès possibles aux stands des Marques de Crèateurs qui exposent au NY Now sont nombreux aussi. J’emprunte néanmoins toujours le même chemin – un petit rituel. Le téléphone à la main, grande “storytelleuse” d’Instagram que je suis (en 2017..), je me dirige vers le nouveau département du Vintage.
Ce que je vois m’emmène vers la dimension de mes rêves : YSL, Chanel, Dior, Ungaro, Balenciaga. Ils sont tous là. Les vrais ! Les seuls ! Pas les Marques zombies de ces nouveaux DA (Directeurs Artistiques)  que je respecte énormément bien sur, mais qui ne me font pas rêver. Moi ce que j’aime c’est le passé et avec lui,  la création avant-garde des entrepreneurs qui osent changer le monde. La création. Elle me fascine depuis toujours. Des vestes, des robes, des chemisiers, des jupes, des foulards, des souliers, des bijoux fantaisies (oui oui accessoires de mode les appelle t on aujourd’hui).

Noon in NYC

Je rends le direct du live instagram, tremblante face à ses pièces qui m’appellent. C’est mon “Midnight in Paris” mais version “Noon in NYC” qui commence.
Je touche ces pièces. Je les caresse. Ou est-ce elles qui me caressent ? (un peu de sensualité cela ne fait pas de mal). Avant même de regarder leur prix, je regarde les coupes et les modèles iconiques. Je sais que ma vie va changer. Je vais repartir plus riche tel un connaisseur d’art ferait une belle acquisition. Je le cherche. Lui. Celui que j’admire par dessus tout dans l’univers de la couture.

Monsieur Saint Laurent.

J’adore beaucoup de créateurs. J’ai toutefois lié depuis longtemps une connexion émotionnelle avec l’enfant terrible de la mode. Ses mots et ses indécisions me plaisent. Je me retrouve dans son gout pour les voyages que lui préfère faire dans ses livres alors que j’aime tellement les aéroports et les avions (D.eu que ca me manque en ce moment). Je suis conquise par son immense respect pour la femme. Et son esprit tortueux d’artiste qui s’épuise à combattre ce qu’il est en vain me rassure.
Yves Saint Laurent incarne la bivalence d’être à la fois réservé, rêveur et introverti et pourtant si séducteur, provocateur et téméraire. Je me suis trouvée en lui, alors que j’étais encore enfant. Encore plus dans ce qu’il était que dans ses créations. Je devais avoir entre 10 et 12 ans lorsque je l’ai choisi comme le créateur de mode de mon coeur. Il n’y en aurait qu’un. Un reportage sur les coulisses du V avenue Marceau et la création de ses défilés de mode.

Ce jour là, au salon NY Now, des trésors inestimables à mes yeux sont venus me chercher.

Parmi eux, cette veste.
Sa couleur est une moutarde subtile – juste ce qu’il faut pour se faire voir alors qu’elle traverse les époques. Ultra ceintrée à la taille, de gros boutons ornent sa coupe parfaite de simplicité. Une coupe tailleur pleine de rondeur. Elle me donne la sensation d’être plus féminine et plus puissante. Elle révèle la beauté des courbes que j’ai longtemps haïes bien que je ne les aurais jamais changées. Il me fallait du temps pour les acceptées. Comme il me fallait être prête pour cette veste.
Je l’essaie. Elle tombe parfaitement. En l’enlevant, je plisse les yeux tentant de prier que la taille soit un 38. C’est un 40. Il faudrait que je commence à m’accepter me dis-je. 38 c’était avant d’être si musclée.. hahaha.
Je craque. Et je fais d’elle l’acquisition de mon été 2017. Elle est mienne.

24 mars 2020 – ma Veste au présent

Je ne l’ai jamais portée. Pas une seule petite fois en 2 ans et demi a t-elle quitté mon vestiaire. J’attendais une occasion spéciale. Un moment dans le temps, un moment qui marquerait mon temps.  Sarcastiquement et un peu dans le jugement, je me dis que parfois les gens, certaines gens, ne comprennent pas le lien qui lie un vêtement à l’histoire. Mais quelque part tant mieux pour moi, sinon cette veste n’aurait jamais dormi toutes ces nuits dans mon placard.
Je m’étais décidée. Jeudi 26 mars 2020. Je la porterai. Quelle meilleure occasion que le mariage de mon frére et moi à l’honneur en tant que son témoin ? Il n’y en avait aucune.
Dans 2 jours et 2 heures, j’aurais porté  ma veste Saint Laurent Rive Gauche pour l’union officielle à la Mairie de mon frère avec ma future belle soeur. COVID 19 oblige, le mariage est repoussé. Tout sera tout autant voire plus parfait.
Peut-être que ma veste voulait encore un peu se reposer. Peut-être que je devais patienter encore un peu. Bien souvent les belles choses prennent du temps. Dans le secteur dans lequel j’évolue depuis plus de 15 ans, plus le temps prends son temps, plus les choses sont précieuses et éternelles.
Promis petite photo de la veste lorsqu’elle sera portée ! Hâte de marquer ce moment inoubliable habillée de la main de Monsieur Saint Laurent !